Gouvernance : les dirigeants des grandes sociétés américaines critiqués pour leurs rémunérations

Responsabilité sociale - Aux Etats-Unis, l'écart de rémunération entre les dirigeants de grandes entreprises et leurs employés reste très élevé, d'après le rapport annuel de l'ONG américaine As You Sow. Une réalité de plus en plus remise en cause depuis la crise sanitaire. Le point avec Cesare Vitali, Responsable ISR chez Ecofi.

L’enjeu des rémunérations des dirigeants des grandes sociétés devient de plus en plus important, particulièrement dans un contexte de crise qui accentue les inégalités sociales. Malgré la crise sociale et financière, les rémunérations des dirigeants des sociétés américaines continuent d’augmenter, sans être pour autant toujours directement alignées avec la performance financière des sociétés mêmes.

100 dirigeants américains

De plus, les écarts entre le montant des rémunérations des présidents / CEO avec celles des leurs salariés s’élargissent. Ce sont les principales conclusions du rapport annuel «The 100 most overpaid CEOs, are fund managers asleep at the wheel?» de As You Sow, ONG américaine qui s’occupe de favoriser la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, notamment à travers l’activisme actionnarial.

L’étude prend en compte 100 dirigeants des sociétés américaines les mieux rémunérés ; parmi ces dirigeants, c’est le PDG d’Alphabet, la maison-mère de Google, qui en 2020 a perçu la plus grosse rémunération de 280 millions de dollars. C’est plus de 20 fois la rémunération médiane d’un PDG du S&P 500, l’indice boursier composé par les 500 plus grandes sociétés cotées aux États-Unis.

Décorrélation de la performance

Le niveau de rémunérations des dirigeants aux Etats-Unis reste beaucoup plus élevé que celui des standards européens : pour faire une comparaison avec le marché français, le dirigeant le mieux payé du CAC 40 est le CEO de Dassault Systèmes (24,7 millions d’euros). As You Sow souligne que — pour certaines des sociétés analysées — la hausse des rémunérations des PDG n’est pas forcément corrélée avec la performance.

Cette dernière peut parfois même s’avérer négative, comme cela été le cas par exemple pour Discovery, Walt Disney, AT&T, Goldman Sachs, IBM et Ralph Lauren. L’analyse de As You Sow se focalise sur les écarts des rémunérations entre les PDG et leurs salariés, qui ont fortement augmenté ces dernières années. Les écarts sont particulièrement élevés aux États-Unis.

Cela s’explique en partie par les rémunérations des PDG qui sont souvent très importantes, mais aussi parce que certaines sociétés analysées présentent des salaires médians pour leurs employés particulièrement faibles. C’est le cas de VF Corporation, société qui s’occupe de la distribution de vêtements (Napapijri, Vans, Timberland, etc.), dont le salaire médian annuel des salariés se situe à 10 099 dollars.

1 000 fois le salaire médian

Dans l’indice S&P 500, nous trouvons 7 sociétés pour lesquelles le PDG est payé plus de 1 000 fois le salaire médian des employés, dont Starbucks, Kraft Heinz et Alphabet. Dans son étude, As You Sow signale que l’opposition des actionnaires aux rémunérations de PDG s’est accrue ces dernières années et que les gestionnaires de fonds sont de plus en plus mal à l’aise avec certains montants.

Pourtant l’ONG regrette que les grands investisseurs ne s’opposent pas assez aux rémunérations excessives en assemblée générale (AG) : elle signale précisément que seules 15 sociétés du S&P 500 n’ont pas obtenu la majorité des votes en AG pour approuver les rémunérations des PDG.

Enfin, l’ONG américaine invite les sociétés cotées à ajuster les rémunérations en fonction de la crise de la Covid-19. Elle incite les investisseurs à engager les sociétés investies sur cet enjeu pendant la saison des assemblées générales 2021.

Cesare Vitali - Ecofi

Responsable ISR

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