La Parole aux Assos’ – ANCDGP (2/2) : autorégulation du courtage, que faut-il changer dans la réforme ?

Patrimoine - Dans ce nouvel épisode de « La Parole aux Assos' », Le Courrier Financier reçoit l'ANCDGP. Dans le viseur de l'association, l'autorégulation du courtage. Comment restaurer l'indépendance des courtiers vis-à-vis des compagnies d'assurance ? Comment encadrer la Libre Prestation de Service (LPS) ?

Face à la réforme de l’autorégulation du courtage, Philippe Loizelet, président de l’Association Nationale des Conseils Diplômés en Gestion de Patrimoine (ANCDGP), se dit perplexe. « Nous ne comprenons pas pourquoi il faut créer quatre associations de courtiers. Alors qu’il suffit d’élargir les missions de l’ORIAS ! », explique-t-il ce mardi 13 octobre devant la caméra du Courrier Financier. Les données sur la réglementation, la formation continue des courtiers, le montant de leurs garanties financières, ou encore la liste de leurs collaborateurs pourraient ainsi être « rassemblées à moindre coût dans un seul fichier », résume Philippe Loizelet.

Indépendance et responsabilité

Philippe Loizelet approuve le principe d’une réforme. La directive sur la distribution d’assurances (DDA) votée en 2016 par l’Union Européenne (UE) a entraîné un certain nombre de dérives, que le législateur cherche à corriger. « Il y a une évolution extrêmement curieuse avec la DDA, qui est l’obligation de formaliser les partenariats avec les compagnies d’assurance. C’est devenu un droit de vie ou de mort des compagnies, de décider quel courtier va travailler avec eux, parce qu’ils répondront à tel cahier des charges ou à tel volume », déplore Philippe Loizelet. Une telle dépendance du courtier vis-à-vis des compagnies est « totalement anormale ».

C’est le principe même du métier. Chaque professionnel « doit pouvoir saisir toute la place, dans le respect des usages du courtage pour trouver une contrepartie au besoin d’assurance de (son) client », pointe le président de l’ANCDGP. « Il faut restaurer l’indépendance vis-à-vis des compagnies ». Dans le même temps, l’ensemble de la chaîne doit être responsabilisée dans le cadre de la Libre Prestation de Service (LPS) à l’échelle européenne. « Une des voies pourrait être — au même titre que la responsabilité sur les produits importés — que l’importateur ou le commercialisateur soit en partie garant de la signature », suggère Philippe Loizelet.

Les limites de l’action de l’ACPR

Comment lutter contre les « courtiers illégaux » ? D’après Philippe Loizelet, c’est une promesse de Gascon dans les objectifs la proposition de loi de la députée de la Loire (3e circonscription), Valéria Faure‑Muntian. « Rien dans le texte ne permet aujourd’hui à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) — qui est une police administrative — de poursuivre un courtier qui n’est pas immatriculé. Tout juste peut-elle transmettre le dossier à la direction générale de répression des fraudes (DGCCRF) ou au parquet », rappelle le président de l’ANCDGP. En 2015, le Conseil constitutionnel a réduit le pouvoir de sanction de l’ACPR dans le domaine de l’assurance.

La proposition de loi contient un seul article de loi, ce qui lui donne un aspect très « technique » vu de l’extérieur. « Ce n’est pas le cas ! », nous assure Philippe Loizelet. Si la proposition de loi s’avère imparfaite, elle a le mérité d’ouvrir une fenêtre législative. « Ce sont de vastes sujets, il faut à mon avis que l’ensemble de la place s’y intéresse. Nous ne pouvons pas nous contenter de la création d’association qui vont pseudo améliorer la représentativité de nos métiers auprès des tutelles », résume le président de l’ANCDGP. Pour Philippe Loizelet, il n’y a aucun doute : « l’enjeu est plus sur le fond que sur la forme ».

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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