Prolongement partiel du dispositif Pinel : attention au creusement des inégalités territoriales

Immobilier - C’est une annonce très attendue qui a été confirmée dans le projet de loi de finances 2018 voté récemment par l’Assemblée nationale : le dispositif Pinel sera prolongé pour quatre années supplémentaires dans certaines zones urbaines. D’autres en seront toutefois bientôt exclues.

Une incertitude entourait l’avenir du dispositif Pinel depuis quelques mois. Pour rappel, ce dispositif lancé en 2015 permet aux particuliers de bénéficier d’une réduction d’impôt pouvant aller de 12 à 21% en métropole, et de 23 à 32% dans les départements d’outre-mer, en achetant un logement neuf et en le mettent en location pour une durée d’au moins 6 ans. Le but du dispositif est ainsi de favoriser la construction de logements neufs dans une optique de rénovation urbaine. D’après les textes jusqu’alors en vigueur, le dispositif aurait pu s’arrêter à la fin de l’année 2017.

Quelles sont les nouvelles mesures annoncées pour 2018 ?

Le projet de loi de finances 2018, adopté fin novembre par l’Assemblée nationale, prévoit finalement dans l’article 39 une prolongation du dispositif Pinel jusqu’au 31 décembre 2021 dans les grandes agglomérations françaises. Sont concernées les zones A et B1, qui correspondent à la région parisienne et aux grandes agglomérations de la métropole comme Lyon, Bordeaux, Lille, Nantes ou encore la côte d’Azur. La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane sont également classées en zone B1.

Pour les agglomérations de moins de 250.000 habitants et les zones rurales, correspondant aux zones B2 et C qui ne sont pas des zones « tendues », le dispositif prendra en revanche bientôt fin. Les acquisitions de logements ayant fait l’objet d’une demande de permis de construire au plus tard le 31 décembre 2017 resteront éligibles au dispositif Pinel, mais uniquement à condition que cette acquisition soit réalisée au plus tard le 31 décembre 2018.

Actuellement, le texte n’est pas définitif : il devra être voté par le Sénat le 12 décembre prochain et adopté définitivement par l’Assemblée nationale le 22 décembre. D’ici là, des éléments peuvent encore évoluer à la marge par rapport au texte actuel. La prolongation de la loi Pinel dans les zones A et B1 est une bonne nouvelle, aussi bien pour les promoteurs ayant des projets de construction en cours, que pour les villes qui bénéficieront toujours de ce dispositif pour assurer une rénovation progressive de leur parc de logements. Le fait de ne pas mettre fin immédiatement à ce dispositif dans les zones B2 et C est également bénéfique pour ne pas compromettre des milliers de chantiers, mais il est néanmoins regrettable que le dispositif prenne bientôt fin dans ces zones, au risque de creuser certaines inégalités urbaines.

Quelles seront les conséquences de la fin du dispositif dans les zones B2 et C ?

Les agglomérations de Brest et de Saint-Etienne, classées en zone B2, sont parmi les plus concernées par ce problème. Celles-ci ont encore d’importants besoins de nouveaux logements, qui ne pourront bientôt plus être soutenus par le dispositif Pinel.

À Brest par exemple, la démographie reste dynamique : la progression du nombre de jeunes âgés de 15 à 24 ans entre 2008 et 2013 a été de +1,2% dans la métropole brestoise, alors qu’elle n’a atteint que de +0,3% et +0,5 % en Bretagne et dans l’ensemble de la France sur la même période.

Les acquéreurs et les locataires sont confrontés dans cette ville à une offre de biens anciens, peu esthétiques et mal isolés, construits dans l’immédiat après-guerre. Ces logements peinent logiquement à trouver preneurs malgré l’importante demande de logement. La construction de nouveaux biens, soutenue par le dispositif Pinel, constituait l’une des réponses à cette problématique en offrant un meilleur niveau de confort et en respectent les normes de construction actuelles.

Avec l’arrêt du dispositif, le marché de l’immobilier brestois pourrait de nouveau connaître un important déficit d’offre des logements de qualité, qui pourrait à terme provoquer une montée des prix de ce type de bien alors que la ville avait jusqu’ici une politique saine de diversification de l’offre et de maintien des prix à un niveau abordable. Brest métropole avait par exemple introduit des obligations de diversité d’offre d’habitat qui permettaient notamment de soutenir la construction de 25% de logements sociaux dans toute opération immobilière neuve de plus de 20 logements.

Les protestations des professionnels de l’immobilier et des maires de ces communes auprès des pouvoirs publics ont déjà permis d’adopter différents amendements par rapport au projet d’origine, en évitant notamment l’arrêt brutal du dispositif Pinel dans les zones B2 et C.

La prochaine étape sera la publication d’un rapport consultatif en septembre 2018, qui visera à évaluer les effets de la loi Pinel en France. Ce rapport pourrait faire ressortir l’utilité du dispositif dans certaines agglomérations de zones B2, qui pourraient alors être réintégrées en zone B1 de manière à bénéficier d’un maintien du dispositif Pinel jusqu’en 2021.