Immobilier : la montagne séduit-elle toujours ?

Immobilier - En septembre, l’étude de DSF (Domaines Skiables de France) révélait que la France avait cédé en 2016 sa place de première destination mondiale de ski aux Etats-Unis. Néanmoins, la France reste la championne européenne, grâce notamment à des tarifs plus bas que ceux pratiqués dans les pays voisins tels que l’Italie ou l’Espagne1. Charles-Antoine Sialelli, consultant Alpes pour Athena Advisers, livre son analyse sur le marché immobilier des Alpes françaises.

La baisse de la fréquentation des pistes influe-t-elle sur les investissements ?

Cette contre-performance de la France à une échelle internationale est à nuancer car elle est majoritairement liée aux conditions météorologiques ; les Etats-Unis ayant bénéficié d’un enneigement plus que correct sur la période étudiée. A noter également que la France a occupé la première place pendant 4 ans et qu’elle reste la grande favorite en Europe. Cela étant, à en juger par les chiffres de ventes de l’immobilier dans les Alpes, les investisseurs ont bien compris que cette « crise » n’est pas structurelle.

Après un maintien des prix dans les stations au moment de la crise en 2009 et jusqu’en 2012, le marché de l’immobilier dans les Alpes françaises a connu un vrai rebond ces trois dernières années, particulièrement en 2014/2015 : l’ensemble des stations a observé un retour en masse des acquéreurs, notamment internationaux et enregistré un nombre de ventes record.

Si la météorologie influe effectivement sur la fréquentation touristique, cette donnée est à relativiser car les stations de ski investissent régulièrement afin de diversifier leur offre pour rester attractives toute l’année et non plus seulement en hiver. Les investissements dans de nouvelles infrastructures telles que des parcours de golf ou encore des Aquacenters, comme à Châtel, St Martin de Belleville ou encore Courchevel deviennent donc monnaie courante. Des initiatives qui semblent porter leurs fruits comme en témoignent les chiffres de ventes diffusés par les notaires qui ont enregistré une croissance d’environ 9% entre janvier et août 2016.

En 2015, les clients internationaux représentaient 21,80% des investisseurs dans les Alpes, alors qu’ils ne représentaient que 15,63% en 2012 : une croissance de plus de 6 points de pourcentage en seulement 3 ans, qui témoigne du succès grandissant des stations françaises auprès de la clientèle internationale.  Cette tendance favorable a de fortes chances de se poursuivre en 2016/2017.

Qu’en est-il des investisseurs britanniques, majoritaires dans les Alpes françaises ?

Ces dernières années, on note une tendance de retour des investisseurs étrangers qui trouve ses origines dans les conditions bancaires françaises très avantageuses. Contrairement à d’autres pays, la France offre à la fois des taux fixes sur 20, 25 ou 30 ans, mais également des taux de prêts immobiliers historiquement bas actuellement inférieurs à 2%.

Alors qu’avant le Brexit, la livre s’échangeait à 1,30€ voire 1,40€, le taux de change actuel se rapproche de la parité avec une livre qui oscille entre 1,10€ et 1,12€, se révélant alors de moins en moins favorable pour les Britanniques. La récente annonce de l’échéance de sortie de la Grande Bretagne de l’Union Européenne à fin mars 2017 est venue fragiliser encore davantage la Livre Sterling sur les marchés. Ainsi, s’ils ne s’étaient pas fait sentir les premiers temps, les effets du Brexit semblent s’accroître à mesure que l’échéance se rapproche.

La sortie de la Grande-Bretagne de l’Union Européenne n’a cependant pour l’instant eu que très peu d’impacts sur les investissements Britanniques dans les Alpes : seules 5% des ventes dans les Alpes n’ont pas eu lieu suite au Brexit, les Britanniques représentant toujours 90% de la clientèle internationale. La stabilité des taux très intéressants en France permet en effet aux Britanniques de poursuivre leurs investissements dans l’Hexagone, qui reste l’une de leurs destinations préférées.

On peut néanmoins anticiper une baisse des investissements britanniques due au Brexit, en particulier pour les budgets autour de 500,000€. Le marché des Alpes gardera cependant son dynamisme croissant grâce à l’augmentation du nombre d’investisseurs Hollandais, Belges, Suisses, Suédois, Polonais et Slaves que l’on observe actuellement.

La hausse des prix de l’immobilier aux Pays-Bas, la proximité et les prix compétitifs de la France pour les Suisses ou encore la meilleure qualité des domaines skiables français par rapport aux Scandinaves sont autant de facteurs favorisant l’attractivité des Alpes auprès des investisseurs étrangers. La France conserve donc à juste titre son statut de championne européenne.

La montée en gamme des stations, un enjeu pour rester attractives

La France, reconnue pour sa culture des sports d’hiver, a opéré dans les années 1970 une véritable politique de développement de ces stations. Bénéficiant d’infrastructures de qualité et de beaux domaines skiables, les Alpes françaises continuent de cultiver leur attractivité auprès des touristes en multipliant les investissements : diversification des activités proposées, remontées mécaniques toujours plus performantes, ouverture d’hôtels 5 étoiles et de restaurants étoilés, etc.

A titre d’exemple, les stations de l’Alpe d’Huez et des 2 Alpes seront reliées d’ici 2021 afin de créer un des domaines skiables les plus grands du monde. Le coût total de cette liaison s’élève à plus de 60 millions d’euros, un investissement stratégique pour drainer davantage de visiteurs et séduire les investisseurs.

Par ailleurs, pour répondre aux attentes d’une clientèle aisée – française et étrangère –, à la recherche d’un niveau de confort et de prestation élevé, des rénovations importantes du parc immobilier et hôtelier des stations ont été réalisées. Ces dernières années, la qualité des programmes proposés associée à un phénomène de rareté permettent ainsi au secteur de rester dynamique malgré des conjonctures économiques, françaises et étrangères, moroses.

De l’investissement-plaisir à l’investissement rentable

En parallèle de la démocratisation des sports d’hiver et de son accessibilité croissante, l’offre – elle aussi – a évolué avec les années : alors qu’un 2 pièces dans les années 1970/1980 pouvait occuper une surface de 20 à 25 m², les appartements de ce type ont aujourd’hui une surface habitable de 35 à 45 m², rendant la location plus confortable et donc, plus recherchée.

Par ailleurs, si l’investissement en montagne est souvent dédié à une utilisation personnelle du bien, de plus en plus d’acquéreurs réalisent des investissements en visant à terme une certaine rentabilité locative.

« Il faut bien distinguer les acquisitions de résidences secondaires des investissements locatifs. Les biens à privilégier ne sont pas les mêmes selon le type d’investissement réalisé. En moyenne dans les Alpes, le budget des clients internationaux se situe entre 800 000 et 900 000€, mais tout dépend véritablement de l’emplacement : les prix des propriétés dans les Portes du Soleil n’ont rien à voir avec ceux des 3 Vallées ! Par ailleurs, les acquéreurs doivent adapter leurs critères de recherche selon qu’il s’agit d’un investissement « plaisir » ou d’un investissement locatif », rappelle Charles-Antoine Sialelli.

« L’année 2016 a été très satisfaisante du point de vue du nombre de ventes réalisées et de l’attractivité retrouvée de ces destinations, malgré des conditions météorologiques parfois capricieuses et susceptibles d’effrayer les acquéreurs. L’année 2017 sera jalonnée de lancements de très beaux programmes immobiliers, ce qui laisse présager que la « love affair » de la clientèle internationale avec la France n’est pas prête de s’éteindre », conclut le consultant.