A quoi cela est-il dû, et quelles en sont les conséquences ?
Ce phénomène n’est pas principalement dû à une déception sur le niveau de croissance attendu (même si le premier trimestre a été faible aux États-Unis). Ce qui est en cause est principalement l’inflation. Non pas tant celle des matières premières qui est instable et partiellement aléatoire, que celle qui est endogène au système économique, notamment l’inflation des salaires.
La faible inflation salariale aux États-Unis est d’autant plus étonnante que le taux de chômage, lui, n’a cessé de baisser pour atteindre aujourd’hui 4,3% selon les statistiques officielles. A ces niveaux-là, on peut parler de « plein emploi ». La machine économique est censée commencer à s’emballer. Or rien ne se passe. Pourquoi ?
La plus simple hypothèse est qu’il s’agit d’une question de temps. Après la grande dépression de 2008, tout se rétablit avec lenteur, tant la croissance que l’inflation. Et cela d’autant plus qu’une seconde récession a eu lieu en Europe en 2011-2012. Mais ce qui doit arriver, c’est-à-dire l’inflation, arrivera.
Une autre est plus pessimiste : comme le rappelait Mario Draghi lors de sa dernière conférence de presse, bon nombre d’emplois créés ces dernières années sont mal payés, peu qualifiés, notamment dans le domaine des services. C’est « l’Uberisation » des emplois…
Enfin, certains pans de l’activité économique, typiquement ceux qui sont liés à la digitalisation des échanges, s’effectuent maintenant à un coût proche de zéro alors qu’ils correspondent à des services réels. Par exemple, toute la correspondance par courrier électronique, la diffusion de l’information, beaucoup de services bancaires, etc.
Selon que l’on adopte l’une ou l’autre de ces hypothèses (ou un composite), on sera tenté de penser que l’inflation finira par se matérialiser, ou bien au contraire que « cette fois, c’est différent » … ce qui s’est généralement avéré illusoire.
Les conséquences de cet état de fait sont multiples
Il est redevenu provisoirement favorable d’investir dans des obligations gouvernementales, d’avoir de la « duration » en portefeuille.
Autre conséquence, indirecte : le dollar US s’est affaibli par rapport à l’euro, car le marché ne croit guère aux scénarios de remontée de taux de la Fed, mais anticipe un resserrement monétaire en zone euro à moyen-long terme.
Enfin, les actions typées « value » (c’est-à-dire faiblement valorisées), comme les banques et les producteurs de matières premières, ont cédé beaucoup de terrain récemment face aux actions de style « croissance » qui prospèrent surtout en cas de taux longs faibles et de pente des taux peu accentuée.