Risque sanitaire : les marchés nerveux, pas d’annonce marquante de Jerome Powell

Asset Management - Cette semaine, le président de la Réserve fédérale (Fed) américaine s'est exprimé devant le Congrès. L'absence d'annonce marquante a réactivé le stress des marchés. Comment comprendre les creux qui se forment actuellement ? Les explications d'Alexandre Baradez, Responsable Analyses Marchés chez IG France.

Aversion au risque sur les marchés mondiaux depuis quelques jours dans un contexte de hausse du risque sanitaire et d’incertitude autour de la prochaine phase d’action des banques centrales, le tout en pleine campagne électorale américaine qui rend plus difficile un accord bipartisan sur le prochain volet de soutien économique.

Peur de la deuxième vague

Il est clair que la hausse des craintes sanitaires, notamment en Europe avec la multiplication des mesures de restriction dans plusieurs pays européens, est à l’origine du décrochage des marchés européens cette semaine. Même s’il est nécessaire de rappeler que les premières secousses boursières sont apparues début novembre sur les valeurs technologiques américaines après le puissant rallye d’août.

La baisse de l’euro depuis quelques jours n’apporte pas de soutien particulier aux valeurs européennes, signe que ce sont bien les craintes sanitaires qui impactent les indices européens ces derniers jours. Comme en témoigne également le repli du taux 10 ans de l’Allemagne. Mais ce serait toutefois trop simple de tout attribuer à la « seconde vague » de Covid-19.

L’attentisme de la Fed

Cette semaine est marquée par l’intervention du président de la Réserve Fédérale devant le Congrès américains. Ses interventions sont toujours surveillées de près par les marchés, surtout en période de hausse de la volatilité. Et les marchés restent clairement sur leur faim depuis la première intervention ce mardi 22 septembre : aucune annonce nouvelle en termes de politique monétaire et surtout un renvoi régulier des responsabilités de la relance économique au Congrès américains.

Cela fait plusieurs semaines que les membres du FOMC indique qu’une nouvelle phase de soutien budgétaire est nécessaire pour soutenir la reprise économique et notamment la demande. Sachant que l’économie américaine n’a retrouvé que la moitié des emplois « détruits » depuis le début de la crise sanitaire.

La Fed qui se penche également sur la faible efficacité du programme « Main Street » visant à aider les petites et moyennes entreprises. A ce jour, moins de 1 % de la capacité de ce programme de 600 milliards de dollars a été utilisé… sachant que les petites et moyennes entreprises sont pourvoyeuses d’une grande partie des emplois Outre-Atlantique.

Elections américaines

L’absence de nouvelles annonces particulières par Jerome Powell et les appels répétés aux responsables politiques inquiètent les marchés — qui craignent que la situation ne s’enlise à l’approche de l’élection américaine, rendant les négociations budgétaires beaucoup plus délicates. Sans oublier les déclarations récentes du président américain qui indique que l’élection se finira devant la Cour Suprême en raison notamment de ses craintes concernant le vote par correspondance.

Une déclaration de Jerome Powell a accéléré la correction des indices mercredi : celle indiquant que la Fed intervenait très peu désormais sur le marché secondaire des obligations d’entreprises — c’est-à-dire à travers les ETF notamment. Or nous nous souvenons qu’au printemps dernier, les premières annonce de la Fed au sujet d’une intervention sur cette classe d’actifs avait fait bondir les indices et l’appétit général pour le risque.

C’est le genre de petite phrase que le marché n’aime pas entendre, surtout lorsque la volatilité ne retombe pas depuis quelques jours. C’est in fine une bonne nouvelle — car cela signifie que la situation des marchés s’est améliorée — mais c’est le timing de l’annonce qui inquiète, au moment où le risque sanitaire s’accroît de nouveau.

Stress et creux de marché

Un autre déclaration ce mercredi 23 septembre, celle de Charles Evans, membre de la Fed également, a participé à renforcer le stress. Ce dernier estime que le cadre actuel de la politique monétaire est adéquat et qu’elle deviendra plus accommodante « si nécessaire ». Ne présageant donc pas forcément d’une nouvelle action imminente.

La phase de stress qui frappe les marchés cette semaine doit être perçue comme une « réplique » après l’épicentre du stress en mars : ce qui signifie qu’il est peu probable de voir les indices se rapprocher à nouveau des niveaux de mars, car il est peu probable d’assister à un nouveau confinement général.

Ce qui signifie aussi que les creux de marché qui se forment sont plutôt des opportunités de repositionnement haussier pour le moyen terme, plutôt que l’émergence de mouvements baissiers durables, notamment avec les banques centrales toujours présentes.

Alexandre Baradez - IG France

Responsable Analyses Marchés

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