Réformes : accélération en vue ?

Asset Management - Les réformes graduelles menées au cours des toutes dernières années, devraient être poursuivies si le nouveau Président français Emmanuel Macron obtient, suite aux élections législatives de juin 2017, l’appui parlementaire nécessaire pour mettre en œuvre son programme.

La France a réalisé, au cours des dernières années, moins de réformes économiques spectaculaires que ses trois plus grands partenaires de la zone euro (en ne considérant ici que les mesures du type de celles recommandées par l’OCDE et la Commission européenne, généralement considérées comme favorables à la concurrence et à l’économie de marché). Confrontées tour à tour à d’importantes difficultés, l’Allemagne (durant la décennie 2000) puis l’Espagne (surtout en 2012) et, dans une moindre mesure, l’Italie (surtout en 2014) ont en effet réalisé d’importants efforts, ciblant particulièrement le marché du travail et couronnées (du mois dans le cas des deux premiers pays) par d’indéniables succès en termes de réduction du taux de chômage.

En France, où la situation économique était meilleure que celle de l’Allemagne au début des années 2000, et moins catastrophique que celle de l’Espagne et de l’Italie lors de la crise des dettes souveraines de 2011-2012, les gouvernements successifs n’ont été ni forcés ni désireux de prendre des mesures aussi impopulaires et politiquement risquées.

Des réformes plus graduelles n’en ont pas moins été menées, particulièrement au cours des toutes dernières années. Ces efforts, aujourd’hui reconnus par les organisations internationales, devraient être poursuivis si le nouveau Président français obtient, suite aux élections législatives de juin 2017, l’appui parlementaire nécessaire pour mettre en œuvre son programme.

Le rythme des réformes a accéléré en France au cours des deux dernières années

L’édition 2017 du rapport Objectif croissance de l’OCDE qui dresse, tous les ans, le bilan des réformes réalisées par chaque pays et actualise ses recommandations a été publié. De façon intéressante, la France se trouve classée dans ce rapport, pour les réformes menées durant la période 2015-16, de façon très favorable par trois aspects :

L’intensité des réformes répondant aux recommandations de l’OCDE (seules sont prises en compte les décisions déjà effectivement traduites en lois).

Le fait que les réformes ont accéléré en France en 2015-2016 alors qu’elles ont décéléré dans la majorité des autres pays par rapport à la période 2013-2014 (certains pays trouvent toutefois des circonstances atténuantes liées aux difficultés de mise en œuvre des changements très importants réalisés en 2013-2014).

Le fait que les réformes françaises sont jugées relativement équilibrées portant à la fois sur le marché du travail et sur le marché des biens et services. Les études de l’OCDE s’efforcent régulièrement de démontrer l’intérêt des synergies entre des réformes menées simultanément dans des directions différentes, susceptibles d’atteindre ainsi des résultats meilleurs que ceux que l’on pouvait obtenir si elles étaient menées isolément.

Le programme du nouveau président répond largement à ces recommandations

La mise en œuvre du programme d’E. Macron peut renforcer la confiance des marchés et favoriser une meilleure coopération franco-allemande.

L’application de ces mesures, étroitement en phase avec les recommandations de l’OCDE et de la Commission Européenne, pourrait renforcer la confiance des marchés, dont les prescripteurs (analystes, agences de notation, think tanks, presse financière) partagent généralement les vues de ces organisations. Elle pourrait également contribuer à un meilleur fonctionnement du couple franco-allemand, la confiance de l’Allemagne nécessitant que la France, en plus de tenir ses engagements budgétaires, fasse la preuve qu’elle est capable de surmonter les réticences aux changements « pro-concurrence » d’une grande partie de son opinion publique et de ses professions organisées.

L’application de ce programme ne devrait pas, toutefois, donner un coup de fouet immédiat à la croissance.

Potentiellement très positives à long terme, ces réformes structurelles n’ont pas pour vocation de créer un choc de croissance immédiat. Les mesures portant sur le marché du travail, notamment, ont même parfois tendance à créer un effet de « courbe en J » négatif pour l’emploi et l’activité pendant quelques trimestres avant de produire leurs gains. Par ailleurs, elles ne sont pas accompagnées d’un stimulus budgétaire conséquent puisqu’Emmanuel Macron entend réaliser, dès 2018, de nouvelles économies de dépenses publiques dont seulement une partie sera affectée à des baisses d’impôts (il compte également déployer un plan d’investissement mais, au final, la baisse du déficit doit bien se poursuivre chaque année). Des effets de confiance positifs pourraient, il est vrai, intervenir, cependant nous ne pensons pas que la croissance devrait dépasser beaucoup 1,5 % au cours des premières années de son mandat (notre prévision actuelle est de 1,4 % pour 2017, 1,3 % pour 2018).

Dans tous les cas, encore faut-il, pour que ce programme soit appliqué, que le nouveau Président bénéficie, à l’issue des élections législatives des 11 et 18 juin, de l’appui parlementaire nécessaire pour constituer une majorité gouvernementale. Les sondages lui sont pour le moment favorables mais la partie n’est pas encore gagnée. Sans succès aux législatives, c’est-à-dire en cas de gouvernement de cohabitation, la conversion de l’économie française à la « flexi-sécurité » devra encore attendre. Même en cas de victoire, cependant, rappelons que cette conversion est un processus difficile qui ne manquera pas de se heurter à de très nombreux intérêts organisés, marqués tant à gauche qu’à droite.