Marchés actions européens : cette fois-ci pourrait être la bonne

Asset Management - Les actions européennes, plombées par les inquiétudes d’ordre politique, semblent sous-évaluées depuis un an. Maintenant que les risques s’apaisent et que l’économie de la zone euro se renforce, la tendance pourrait bien s’inverser.

L’issue du référendum au Royaume-Uni a fait office d’événement déclencheur, poussant de nombreux investisseurs à retirer leurs fonds des marchés européens, par peur du risque politique à l’approche d’une série d’élections cette année en Europe. Ce risque ne s’est pas totalement dissipé depuis, puisque des scrutins doivent encore avoir lieu en Allemagne plus tard cette année, et peut-être aussi en Italie, ce qui soulèverait davantage d’inquiétudes. Toutefois, le risque se veut moins préoccupant depuis la fin des élections en France.

Parallèlement, l’économie européenne a commencé à dégager une croissance solide. Non seulement la zone euro a enregistré une croissance annuelle plus rapide que les États-Unis en 2016, pour la première fois depuis la crise financière, mais en plus elle continue de surperformer.

Ainsi, au premier trimestre 2017, la croissance de la zone euro est ressortie à 2% en rythme annualisé, soit la cadence la plus rapide depuis six ans, pour le second trimestre d’affilée. Il est aussi encourageant de voir que le renforcement de la croissance s’est traduit par une progression régulière de l’emploi, et le taux de chômage s’est établi en mars à 9,5%, son plus bas niveau depuis huit ans, contre 10,2% l’année précédente. De plus, les indicateurs économiques les plus avancés, comme les enquêtes auprès des directeurs d’achat, suggèrent que la croissance n’a pas décéléré en début de deuxième trimestre.

L’accélération de la croissance a déjà commencé à se répercuter dans les résultats des entreprises. Les analystes ont relevé leurs prévisions de bénéfices depuis le début d’année. Toutefois, ces révisions à la hausse restent pour l’instant plutôt modestes. Les analystes prédisent certes une croissance du résultat annuel des entreprises de 20% en 2017 et de 10% en 2018, mais cela ne représente qu’un relèvement de deux points de pourcentage par rapport aux taux de croissance qu’ils prédisaient au début de l’année. Ces chiffres peuvent sembler très honorables, toutefois il convient de se rappeler qu’ils tiennent compte d’une base particulièrement faible puisque les résultats avaient baissé en 2016.

Les investisseurs sont conscients depuis un certain temps de l’embellie des perspectives de bénéfices des entreprises, toutefois les flux de capitaux vers les actions européennes étaient jusqu’à présent freinés par les incertitudes politiques. Les flux nets d’investissement étaient clairement à la vente au cours du second semestre 2016 et du début de l’année 2017, ce qui est largement attribuable à la montée des incertitudes politiques. Cette tendance a commencé à s’inverser, ce qui s’explique notamment par l’allègement considérable du risque politique. Toutefois, les sorties nettes de capitaux au cours de l’année écoulée restent importantes.

Même si les actions européennes ont affiché une forte hausse sur le début de l’année 2017, avec un indice Eurostoxx en hausse de 9,55% à fin mai, elles restent toujours sous-évaluées. Non seulement les bénéfices des entreprises ont surpassé les anticipations, mais les statistiques économiques sont également en progression, tandis que les risques politiques nationaux sont en recul.

Sous la présidence de M. Macron, il est possible que la France entreprenne une campagne de réforme de ses marchés des biens et du travail, similaire à celle adoptée par l’ex-chancelier allemand Gerhard Schröder il y a quinze ans. Il est raisonnable de penser que cela pourrait donner une nouvelle impulsion à l’intégration européenne, en particulier s’il est possible de persuader d’autres pays, et notamment l’Italie, d’entreprendre des réformes similaires.

Après une réunion avec Emmanuel Macron le 14 mai, la chancelière allemande a indiqué qu’elle s’efforcerait de promouvoir une plus grande intégration dans la zone euro. Interrogé pour savoir si l’Allemagne consacrerait davantage de son excédent budgétaire à la région sud de l’Europe, Wolfgang Schäuble a déclaré au journal Der Spiegel qu’il était nécessaire d’avoir des transferts entre pays riches et pays plus pauvres au sein de l’UE.

Les marchés n’ont pas encore réalisé l’importance de ce phénomène. Dans le contexte d’expansion économique qui revient au même moment, les événements récents pourraient annoncer un changement en profondeur pour les marchés actions, qui restaient jusqu’à présent focalisés sur les risques liés à une série d’élections européennes et sur les problèmes économiques persistants dans la zone euro.

Historiquement, les actions européennes ont tendance à se négocier avec une décote par rapport à leurs homologues américaines, cependant actuellement elles peuvent apparaitre bon marché par comparaison, et leur récente surperformance n’y change rien. L’indice Eurostoxx se négocie à un multiple de 16,0x les bénéfices projetés pour 2017, et 14,5x ceux prévus pour 2018, tandis que le S&P 500 se négocie avec des multiples de 18.4x et 16.5x respectivement. Et pourtant, la croissance des bénéfices des entreprises aux États-Unis est annoncée deux fois plus faible que celle en Europe pour cette année, et à peine plus rapide en 2018.

D’autres défis importants se profilent avec les élections italiennes qui devront avoir lieu au plus tard en mai 2018. Les sondages récents suggèrent que le parti démocratique au gouvernement est passé derrière le mouvement contestataire Cinq étoiles, qui agite l’idée d’une sortie de l’euro. À l’extérieur de l’Europe, les tensions géopolitiques ne montrent guère de signe d’apaisement. Sur le plan des perspectives économiques, les spéculations vont bon train sur un possible retrait prochain des stimulations monétaires exceptionnelles mises en place par la Banque centrale européenne ces dernières années, et il est difficile de prédire comment les économies européennes et les marchés financiers feront face à un durcissement de la politique monétaire.