Hausse de l’inflation : vers la fin d’un cycle de « stagnation séculaire » ?

Asset Management - Après la grande crise financière de 2008, un des thèmes favoris des marchés était celui de la stagnation séculaire : un rythme de croissance économique structurellement plus lent, plafonnant à 2% et une inflation inexistante. Force est de constater que ce nouveau scenario est mis à mal par la réalité : les derniers indicateurs de conjoncture montrent que nous sommes revenus dans un cycle normal.

Le monde est entré dans un cycle synchronisé d’expansion en accélération. Loin des 2% annoncés, le taux de croissance s’approche de sa moyenne historique de sortie de récession de 4%. Les indicateurs de confiance sont au plus haut. En outre, la progression de la production industrielle est aussi revenue sur sa tendance de long terme.

Des facteurs structurels puissants freinent la hausse des prix

La concurrence salariale est globale et les pays émergents restent de redoutables compétiteurs en la matière. La mondialisation pèse sur les salaires et sur les prix. Internet permet une transparence totale et le consommateur obtient facilement le meilleur prix. L’effet Amazon joue à plein : avec les progrès fulgurants de l’intelligence artificielle, la puissance des robots augmente sans que les prix n’augmentent. Leur capacité à effectuer des tâches complexes rend l’arbitrage homme-machine très attractif notamment pour les emplois peu qualifiés.

A ce stade du cycle, en situation de plein emploi comme aux Etats-Unis et au Japon, un des moteurs de l’accélération de l’inflation devrait être la hausse des salaires. Faute de main d’œuvre disponible, les entreprises doivent proposer des salaires plus élevés pour pouvoir recruter. Or, il n’en est rien, exception faite de grands groupes comme Starbucks ou Apple qui décident d’augmenter leurs salariés. La modération salariale règne.

Pourtant, l’inflation rebondit. Pourquoi ?

La vigueur de la reprise mondiale a surpris par son ampleur. Après avoir coupé dans les capacités de production, nous faisons maintenant face à des goulots d’étranglement. Le pétrole et les matières premières ont fortement monté et se maintiennent à des niveaux élevés. Les changements de politiques budgétaires, notamment aux Etats-Unis, en faveur d’une plus grande redistribution des richesses viennent alimenter ces tensions.

Si l’inflation rebondit, l’intensité concurrentielle, de son côté, ne faiblit pas. De grands groupes internationaux comme Publicis, Essilor, Danone ou encore Schneider, ne parviennent plus à croître aussi vite que le PIB mondial. Les dernières publications de résultats montrent que peu d’entreprises disposent du pricing power nécessaire pour compenser ce mouvement de reflation qui commence.

Subir est éliminatoire

A l’instar d’Amazon, les « category killer » peuvent changer la donne d’un secteur en moins d’une année. Ces nouveaux entrants profitent de toute faiblesse d’entreprises bien établies pour passer à l’attaque. La sanction boursière est alors sans appel. C’est pourquoi il est capital de bien comprendre en quoi les barrières à l’entrée érigées par une société la protègent de ses concurrents. Certaines entreprises industrielles qui sont devenues des partenaires de leurs clients, comme Pirelli, Thales ou Kion, répondent à ces critères, tout comme certaines marques parmi les plus désirables comme Ferrari.

Gérard Moulin

Gérant Pôle Actions Européennes

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