Etats-Unis : une épargne forcée massive

Asset Management - La crise sanitaire du coronavirus a mis l'économie américaine au ralenti. Outre la baisse de leurs revenus, en partie compensée par l'aide du gouvernement, les Américains ont limité leur consommation. Que représente l'épargne forcée des ménages aux Etats-Unis ? Quel usage feront-ils de ce capital financier dans les mois à venir ? Les explications de Julien-Pierre Nouen, Directeur des études économiques et de la gestion diversifiée chez Lazare Frères Gestion.

Les mesures de restriction liées à l’épidémie de Covid-19 ont entraîné d’importantes pertes d’activité qui ont pesé sur les revenus des ménages. Les revenus salariaux ont ainsi baissé de 11 % entre mars et avril, ceux des indépendants de 18 %. Le regain d’activité en mai a permis à ceux-ci de rebondir.

Le gouvernement a pris des mesures de soutien des ménages, principalement l’envoi de chèques d’un montant pouvant atteindre 1 200 dollars américains (USD) par personne, et une amélioration significative de l’indemnisation du chômage. Cela vient s’ajouter aux stabilisateurs automatiques qui amortissent les chocs économiques au niveau des revenus des ménages.

Mesurer l’épargne contrainte

Dans le graphique ci-dessous, nous estimons le montant des revenus d’activité perdus par rapport à la tendance qui prévalait avant mars. Nous faisons de même pour les transferts nets — prestations sociales moins impôts et cotisations pour résumer — et la consommation.

Ces montants sont rapportés au revenu disponible moyen des douze mois précédents la crise pour mieux estimer l’ampleur de l’épargne forcée. Alors que les ménages américains ont épargné environ 8 % de leur revenu disponible en 2019, « l’épargne forcée » supplémentaire liée à l’épidémie de Covid-19 s’élevait déjà à près de 4 % du revenu annuel à fin mai.

Vers la normalisation des revenus ?

Si la baisse de la consommation contribue à l’essentiel de cette épargne forcée, nous pouvons constater que pour l’instant les mesures prises par le gouvernement ont plus que compensé la baisse des revenus d’activité. Sur les 2,6 % d’augmentation des transferts nets, 2,2 % peuvent être attribués aux mesures des plans d’aide votés par le Congrès. L’envoi des chèques en représente l’essentiel mais l’indemnisation améliorée du chômage monte en puissance.

Maintenant que l’envoi des chèques est bientôt terminé et qu’il ne restera plus que l’indemnisation améliorée du chômage, dans l’attente de nouvelles mesures, la question est maintenant de savoir à quelle vitesse les revenus d’activité vont se normaliser. Après une baisse de 12 % entre février et avril, ils ont déjà rebondi de 3 % en mai. Néanmoins, si le mouvement prend trop de temps, l’importante épargne forcée permettra de compenser une partie des revenus perdus.

Julien-Pierre Nouen - Lazard Frères Gestion

Directeur des études économiques et de la gestion diversifiée

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