Etats-Unis : la dynamique contradictoire des fluides financiers

Asset Management - Après des élections présidentielles mouvementées, les Etats-Unis font face à une deuxième vague épidémique. Face à une dynamique contradictoire des fluides financiers, comment s'annonce la reprise ? Les explications de Thomas Planell, Gérant-analyste chez DNCA.

Après un scrutin présidentiel tumultueux, emmené par le rebond des valeurs industrielles et cycliques, l’indice américain créé il y a 124 ans s’apprête à clôturer en novembre sa meilleure performance mensuelle depuis 1987, à la veille de la célébration de la fin des récoltes de Thanksgiving.

Historiquement, chaque tablée rassemble en moyenne une douzaine de convives autour de la dinde traditionnelle élevée sur les terres des bastions républicains de l’Arkansas et de la Caroline du Nord ou du Minnesota, tenu par les démocrates, où Donald Trump a mieux résisté que prévu. Cette année cependant, moins d’un tiers des Américains se retrouveront en famille à cette occasion.

Anticipation de l’inflation…

Frappé par une seconde vague épidémique, le pays reste en proie à des mesures restrictives qui essaiment d’est en ouest. Les performances des indices boursiers américains et européens — hausse mensuelle historique pour le Stoxx Europe 600 — contrastent avec le message plus prudent donné par les marchés obligataires. 

Malgré les perspectives de reprise et la bonne tenue des anticipations d’inflation, aidées par la hausse de près de 30 % des prix du pétrole en novembre, les rendements des bons du Trésor américain ont cédé le terrain gagné pendant les élections. Les taux réels à 2 ans ont ainsi atteint la semaine dernière leur plus bas niveau depuis 2014 à – 1,4 %, sans que ce soutien naturel de l’or ne produise ses effets sur le métal précieux.

Au contraire, le ratio du cuivre sur l’or — une mesure des anticipations de reprise économique par les marchés de matières premières — poursuit sa hausse fulgurante, après avoir atteint en mars 2020 son plus bas niveau depuis les années 1980… Il existe aujourd’hui une divergence entre les taux et la valorisation des actifs risqués à l’égard du scénario de reprise économique reflationniste.

…et reprise économique

Elle est bien sûr entretenue par la pression de la FED, qui comprime les rendements en achetant 80 milliards de dollars de Bons du Trésor par mois, et qui selon les propos de Charles Evans, au moment de la nomination par Biden de Janet Yellen au Trésor, pourrait s’autoriser à ne pas rehausser ses taux avant fin 2023.

Cette dynamique contradictoire des fluides financiers place les investisseurs dans une position délicate : les multiples des marchés actions qui ont déjà recouvré leurs niveaux pré-crise aux Etats-Unis et intègrent l’effet des vaccins se sont très nettement dilatés depuis le 9 novembre.

Face à eux, les rendements souverains toujours sous pression peuvent présenter un risque d’expansion fatale pour le porteur en cas de matérialisation de la reflation l’an prochain. Le cas échéant, grâce à leur effet de levier sur la reprise et l’inflation, les actions value et cycliques européennes qui sont loin d’avoir comblé leur différentiel de valorisation avec les marchés américains pourraient offrir la meilleure protection.

Thomas Planell - DNCA

Gérant analyste

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