Brexit : les leçons de la saga

Asset Management - L'incertitude des politiques économiques mondiales devient un frein croissant et persistant à la production industrielle et à d'autres données économiques objectives. Quelles en sont les raisons ? Quelles leçons les investisseurs peuvent-ils tirer du Brexit ? Quels seront les impacts à long terme ? Martin Moryson, Chief Economist Europe chez DWS, partage son analyse.

L’incertitude des politiques économiques mondiales a rarement été aussi grande qu’au cours des derniers mois. Du moins, c’est ce qu’indique l’indice mondial d’incertitude sur la politique économique — en anglais « Global Economic Policy Uncertainty » (GEPU) — compilé par plusieurs universitaires américains.

Les données utilisées remontent à 1997 et reposent sur des articles de journaux de 20 pays différents. Elles sont mises à jour mensuellement. Cet indice permet de quantifier l’incertitude engendrée par les politiques économiques. La moyenne est ensuite pondérée en fonction des PIB nationaux.

L’impact de l’incertitude

Bien entendu, de nombreuses questions méthodologiques pourraient être soulevées, notamment en ce qui concerne la pondération des différents pays. Pris au pied de la lettre, l’indice GEPU donne cependant des indications intéressantes, comme le montre le graphique ci-dessous.

Deux choses sont assez frappantes. Le lien entre l’évolution de l’incertitude et la production industrielle mondiale a premièrement été plutôt mince au cours des premières années de la présente décennie. Et ce lien s’est resserré de plus en plus. Nous observons la même chose concernant la corrélation entre l’incertitude et les données du commerce mondial.

Ce que nous apprend le Brexit

Dans un récent discours, Michael Saunders — membre du comité de politique monétaire (MPC) de la Banque d’Angleterre — a avancé quelques raisons intéressantes pour expliquer cette situation. Les incertitudes politiques liées au Brexit semblent faire de plus en plus de dommages. Elles jouent non seulement sur le climat de confiance, mais aussi sur le comportement des investisseurs ces derniers mois. En particulier depuis le 29 mars, jour du lancement du Brexit.

L’une des raisons pourrait être la suivante : dans un premier temps, les entreprises ont réagi aux risques de Brexit en ajournant — plutôt qu’en annulant — toutes les décisions d’investissement. Cela devient toutefois plus difficile avec chaque reconduction du Brexit — la dernière prolongation s’étendant jusqu’au 31 janvier prochain — et pas seulement sur le plan psychologique.

Quels risques à long terme ?

Les incertitudes politiques ne sont pas nouvelles. Mais plus elles persistent, plus il semble difficile d’avoir une vision à long-terme. Cela suggère un risque potentiellement sous-estimé qui entoure les conflits commerciaux américains — l’autre facteur clé de l’augmentation de l’indice GEPU au cours des dernières années.

Plus ces conflits durent, plus l’impact risque d’être grave, même si nous assistons à une trêve temporaire. Les entreprises pourraient être de plus en plus impactées par les menaces politiques, et être tentées de penser que celles-ci seront permanentes.

Martin Moryson - DWS

Chief Economist Europe

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