Angela Merkel, chronique d’une victoire annoncée ?

Asset Management - Les élections au Bundestag sont prévues le 24 septembre prochain. En l’état des sondages, la victoire d’Angela Merkel se dessine mais il faut toujours se méfier des prévisions. En outre, est-ce que la CDU-CSU obtiendra la majorité absolue ou devra-telle passer par une coalition ?

Du fait du mode de scrutin qui mixe système majoritaire et système proportionnel, la constitution de coalition est la règle. Ainsi, malgré la forte victoire de la CDU/CSU, en 2013, ses dirigeants avaient été contraints de constituer une grande coalition avec le SPD. Cette grande coalition était la troisième du genre (grande coalition dirigée par Kurt Georg Kiesinger entre 1966 et 1970 et celle déjà dirigée par Angela Merkel entre 2005 et 2009). Les coalitions les plus fréquentes associent en Allemagne, la CDU/CSU aux libéraux du FDP. Durant les années 90, le SPD s’était lié avec les verts et avait permis à Gerhard Schröder d’effectuer deux mandats. Il est à noter que, dans les années 70, le FDP avait constitué une coalition avec le SPD (avec le chancelier Helmut Schmidt).

Les derniers sondages prévoient 38 % d’intentions de vote pour la CDU/CSU, contre 24 % pour le SPD, 9 % pour le FDP et le parti de gauche radicale Die Linke, 8 % pour le parti populiste Alternative pour l’Allemagne (AfD) et 7 % pour les Verts. Le parti antieuropéen AfD qui, l’année dernière, pouvait espérer recueillir plus de 10 % des suffrages, est en perte de vitesse. Il est crédité de 8 à 9 % des voix. Le FDP qui avait été le grand perdant des dernières élections en n’obtenant, pour la première fois depuis 1949, aucun représentant au Bundestag, pourrait donc faire son retour et espérer constituer une coalition avec la CDU/CSU. Cette alliance est celle souhaitée par une majorité d’électeurs. Elle permettrait en outre au SPD de se repositionner en force d’opposition. Le nouveau responsable du FDP, Christian Lindner, joue la carte de la jeunesse (il a 39 ans) et de la modernité en particulier en ce qui concerne la communication politique. Il s’inspire des campagnes d’Emmanuel Macron ou de Justin Trudeau. En ce qui concerne la future coalition, en femme politique avertie, Angela Merkel laisse toutes les portes ouvertes en ne s’interdisant pas de contracter avec le SPD voire avec les Verts avec lesquels elle a toujours entretenu de bonnes relations.

Depuis le printemps, la campagne électorale est assez terne. Deux thèmes retiennent néanmoins l’attention : la limitation du nombre d’immigrés et l’utilisation des excédents budgétaires.

L’immigration est un sujet sensible au sein des Länder de l’ex-RDA dans lesquels l’AfD a réalisé ces derniers mois des très bons scores. Malgré l’amélioration de la situation économique, la population de ces Länder est hostile aux migrants. La forte proportion de retraités dont les pensions se sont érodées depuis 2003 explique en partie cette contestation. La CDU pourrait enregistrer par rapport à 2013 un net recul en Allemagne de l’Est, la privant alors d’une majorité absolue.

Sur les six premiers mois, le budget affiche un excédent de 18 milliards d’euros soit 1,1 % du PIB. Le FDP demande une baisse d’impôt de 30 milliards d’euros. De leur côté, La CDU-CSU et le SPD sont favorables à un plan qui associerait des dépenses d’investissement et des baisses d’impôt. L’un et l’autre se déclarent pour le maintien d’un équilibre budgétaire strict.

Les victoires dans plusieurs Länder ont conforté la position de la chancelière qui a accentué son écart avec son concurrent, l’ancien Président du Parlement européen Martin Schutz. La situation économique allemande joue en faveur d’Angela Merkel. L’affirmation de la croissance, le plein emploi, l’obtention depuis deux ans de solides excédents budgétaires plaident en sa faveur. Le passage de l’inflation au-dessus de 2 % qui avait inquiété une partie de la population a été éphémère. La question des excédents commerciaux excessifs n’est pas un sujet, bien au contraire. Avec l’amélioration de la situation conjoncturelle et la moindre acuité des crises des dettes publiques en Grèce et dans les autres pays de l’Europe du Sud, les sentiments anti-européens sont en recul. La fin annoncée des rachats d’actifs par la BCE et l’appréciation de l’euro sont également des points positifs pour les électeurs allemands qui sont aussi et avant tout des épargnants.

Philippe Crevel - Cercle de l'Epargne

Directeur

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