L’économie française s’enrhume au quatrième trimestre

Actualités - La croissance française a connu un coup d'arrêt brutal en décembre. Quel impact les grèves de fin d'année ont-elles eu sur l'économie ? Qu'en est-il de la consommation et de l'épargne des ménages ? Bilan de l'année passée, et perspectives 2020.

La croissance française a calé au mois de décembre, victime des grèves et du ralentissement du commerce international. Contrairement aux prévisions, le produit intérieur brut (PIB) en volume a ainsi baissé de 0,1 % au quatrième trimestre 2019, contre un gain de +0,3 % au troisième trimestre.

Source : Le Cercle de l’Épargne – données INSEE
L’économie française s’enrhume au quatrième trimestre
Source : Le Cercle de l’Épargne – données INSEE

En moyenne sur l’année, le taux a été en 2019 de +1,2 % après +1,7 % en 2018. Toutes les composantes de la croissance ont pesé sur son cours. Les dépenses de consommation des ménages n’ont progressé que de 0,2 % au quatrième trimestre contre un gain de 0,4 % au troisième.

La consommation bute sur les grèves de fin d’année

La consommation en biens a été de +0,4 % (après +0,5 %) et celle des services de +0,2 % (après +0,4 %). Elle a souffert des grèves du mois de décembre. Les dépenses de consommation des ménages en biens se sont contractés durant le dernier mois de l’année, -0,3 % après +0,7 % en novembre.

Pour le quatrième trimestre, la consommation de biens fabriqués ralentit (+1,2 % après +1,6 %) tandis que les dépenses en énergie baissent (-1,2 % après -0,1 %) en raison notamment de températures clémentes. En revanche, les dépenses alimentaires rebondissent (+0,4 % après -0,7 %). Sur le dernier trimestre, la consommation de services de transport a fortement reculé (-2,0 %) en relation avec les mouvements sociaux d’octobre et décembre.

En moyenne sur l’année, la consommation des ménages a néanmoins progressé de +1,2 % après +0,9 %. Au regard de l’augmentation du pouvoir d’achat des ménages — la plus forte enregistrée depuis 2007 — cette hausse de la consommation est faible. Elle a augmenté deux fois moins vite que le pouvoir d’achat. Les ménages ont — en grande partie — épargné les gains de pouvoir d’achat générés par les mesures prises après la crise des « gilets jaunes ».

Production industrielle et investissement

La production de biens et services a pâti des grèves. Elle s’est repliée au cours du quatrième trimestre (-0,2 % après +0,3 %). La baisse est forte au niveau des biens (-1,5 % après -0,6 %). En raison des problèmes d’approvisionnement et d’expédition, les industriels ont ralenti leur production. La production manufacturière diminue nettement (-1,6 % après -0,6 %), notamment dans la cokéfaction-raffinage en raison de la maintenance d’une raffinerie et de grèves. La construction est également en recul (-0,3 % après +0,7 %). L’impact des grèves a touché les services.

Sur l’année, la production totale est moins dynamique qu’en 2018 (+1,6 % après +2,0 %). La production manufacturière est en retrait avec une baisse de 0,2 % en 2019, contre une hausse de 0,6 % en 2018 tandis que la production de services ralentit légèrement (+2,2 % après +2,5 %). Au-delà des grèves, l’industrie française a été pénalisée par le ralentissement marqué du commerce international.

Au quatrième trimestre 2019, la FBCF totale ralentit nettement (+0,3 % après +1,3 %). L’investissement des entreprises décélère par rapport au trimestre précédent (+0,3 % après +1,6 %), notamment dans la construction (-0,2 % après +0,9 %), les biens d’équipement et les matériels de transport. L’investissement des ménages ne progresse que de 0,5 %, contre +0,9 % en 2018. Malgré tout, sur fond de taux d’intérêt historiquement bas, l’investissement s’accroît de 3,6 % en 2019 après une hausse de 2,8 % en 2018.

Commerce extérieur et variations de stock

Au quatrième trimestre 2019, les importations ont diminué de 0,2 % comme les exportations. Le repli des livraisons de produits énergétiques et pharmaceutiques est en partie contrebalancé par un rebond des exportations de matériels de transport, avec notamment la livraison d’un paquebot. La contribution des échanges extérieurs à la croissance du PIB est nulle ce trimestre quand elle était négative de 0,3 point au 3e trimestre.

Sur l’ensemble de l’année, la contribution du commerce extérieur a été négative de 0,2 point quand en 2018, il avait joué positivement sur la croissance (+0,7 point). Les entreprises ont déstocké en fin d’année en raison des problèmes de transports et du manque de visibilité sur la suite du conflit social. Au quatrième trimestre 2019, les variations de stocks ont ainsi contribué négativement à la croissance du PIB (-0,4 point après -0,1 point) en particulier dans les matériels de transport et les biens d’équipement.

La croissance française a ralenti en 2019, certes de manière moins forte que celle de l’Allemagne. Elle a été néanmoins handicapée par les tensions commerciales entre la Chine et les États-Unis. Les grèves ont entraîné une perte de 0,2 point de croissance, ce qui est un peu plus que prévu. Les entreprises ont réduit fortement la voilure au niveau de la production au mois de décembre.

Quid de 2020 ?

De leur côté, les ménages ont privilégié l’épargne. Un phénomène de rattrapage devrait intervenir au cours du premier trimestre 2020. La croissance française semble se caler autour d’un rythme médiocre. Elle devrait être proche en 2020 de son niveau de 2019. Les effets de l’épidémie en cours en Chine sont encore difficilement évaluables. Un ralentissement du tourisme est à craindre, ce qui toucherait la France plus que l’Allemagne.

Philippe Crevel - Cercle de l'Epargne

Directeur

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